« Subir une violence verbale répétée nuit à la santé » – La Dépêche du Midi, janvier 2016.
Comment canaliser l’agressivité ?
C’est compliqué. Le monde est plus violent. La violence est dans la société. Les agressions et incivilités sont désormais permanentes, dans les écoles, les transports. Les gens sont de plus en plus exigeants, car sous pression, parfois odieux, ils veulent tout tout de suite.
Est-ce que ces tensions se sont aggravées et depuis quand ?
Ça s’est dégradé depuis une dizaine d’années. Les gens ne supportent plus d’attendre, par exemple. Les rapports sont difficiles.
Quelles sont les professions les plus exposées ?
Dans les transports, les personnels au sol des compagnies aériennes sont victimes d’agressions dès qu’il y a un retard de vol, de la part de voyageurs présumés de catégories socioprofessionnelles supérieures… À Auchan Balma-Gramont, des affiches préviennent que toute agression du personnel sera accompagnée d’une double conséquence : d’abord une sortie sans caddie, ensuite d’éventuelles poursuites judiciaires pour les auteurs.
Comment s’exprime cette agressivité, avec quels effets ?
Les violences sont d’abord verbales, parfois physiques. La violence verbale quotidienne est grave pour la santé. Elle détruit l’estime de soi-même. L’organisation du travail est aussi en cause. Un chauffeur de bus doit ainsi conduire, valider les tickets, exécuter diverses fonctions. Soit il le fait, mais se fait agresser tous les jours, à ses risques et périls. Soit il laisse faire mais risque de subir les remontrances de sa hiérarchie et d’avoir une mauvaise estime de son travail et de soi. La contradiction est insupportable. Cela crée un sentiment d’injustice énorme. Les salariés qui en sont victimes ne dorment plus, ont une boule au ventre au moment de prendre leur travail car ils savent qu’ils vont être insultés. Une étude de chercheurs toulousains a démontré que le sentiment d’injustice peut avoir des conséquences réelles sur la santé physique, avec développement de maladies diverses, d’éventuelles dépressions.
Comment doivent réagir les entreprises ?
Elles sont parfois confrontées à un absentéisme qui explose, sans savoir pourquoi, à une baisse de rentabilité. Elles doivent mettre en œuvre des formations sur le respect et la courtoisie, et manifester son soutien à leurs employés, comme l’a fait Auchan par exemple.
*Le Dr Bénichoux, fondatrice de Better Human Cie et auteur du livre « Et si on travaillait autrement» (Ed. Eyrolles) a ses bureaux à Montrabé (31) et Paris.
Propos recueillis par Philippe Emery.